Brigitte : " En prison, la seule béquille qu’il a trouvé, c’est l’islam "
Brigitte vit dans le sud de la France. Son fils, Laurent, 34 ans, est jihadiste en Syrie depuis 2012. Elle témoigne.
Sa première incarcération remonte à ses seize ans : 1 mois pour une bagarre, j’ai refusé d’aller le voir. La deuxième fois c’était l’année suivante : 18 mois ferme (je suis allée le voir chaque semaine ). A la fin de sa peine alors qu’il allait sortir, il a été mis en cause dans une affaire à laquelle il a toujours nié sa participation, il n’est donc pas sorti. Il s’est mis à maigrir, m’a dit que cette fois là il n’y était pas ! La procédure a durée des années. On l’a fait rentrer puis sortir de prison. Il a été finalement condamné à 5 ans qu’il a donc purgé en 3 fois. Il ne l’a jamais pardonné et en a beaucoup souffert.
C’est à cette période où il a été mis en examen pour ces faits qu’il a fait la connaissance d’un détenu plus âgé. Mon fils ayant besoin d’aide, a demandé aux surveillants de partager la même cellule que cet homme ! Cela a été accepté par la pénitentiaire ! Je l’ai vu changer au fil des semaines. Cet homme l’a converti à L’islam. Il avait beaucoup maigri mais son compagnon de cellule lui apprenait à faire à manger et à prier. La religion était devenue le seul sujet de conversation Au parloir il ne parlait plus d’autre chose.
Lors de sa dernière peine il a passé une période en liberté conditionnelle. Il a été hébergé dans l’est de la France. Nous nous sommes vus 1 fois au Bourget au grand rassemblement des musulmans de France. Il y était avec un français à qui j’ai tendu la main pour lui dire bonjour mais qui me l’a refusée car il venait de faire ses ablutions pour la prière. Il donnait déjà des leçons de morale à une musulmane amie de la personne qui l’hébergeait !
A sa dernière sortie de prison en 2006, mon fils est venu vivre chez moi, il était complètement désocialisé, et ne ratait aucune prière, il allait à la mosquée de la ville voisine, passait beaucoup de temps seul dans mon appartement, allait cependant marcher de temps en temps dans la montagne. Mon appartement était devenu sa cellule, pour des recherches d’emploi, il m’a demandé d’installer internet, je l’ai fait ; je n’aurais jamais du ; je n’ai jamais vu personne chez moi mais je sais qu’il côtoyait à la mosquée des personnes extrémistes car son discours était devenu violent. J’étais une mécréante ! Le soir, il écoutait des talibans chanter et je les entendais de ma chambre. De violentes disputes nous ont opposés à ce sujet il voulait que je regarde. Les disputes entre lui et moi étaient quotidiennes et parfois violentes, je ne pouvais recevoir personne !!
Il a d’abord parlé de l’Afghanistan. De partir là bas. A l’époque il n’était pas question de départs massifs pour la Syrie.
Le départ : Il ne nous a rien dit jusqu’au dernier moment. Je l’ai accompagné en voiture à l’aéroport. Il n’a pas pipé un mot pendant tout le trajet. Il avait pris le minimum : Un petit bagage avec une petite trousse de toilette. Il a pris un vol pour la Turquie. C’est seulement à l’aéroport que j’ais découvert sa destination. J’étais sous le choc. Le lendemain il appelé pour dire qu’il était bien arrivé.. Plusieurs mois après il a appelé sur Skype pour dire qu’il était en Syrie.
La Syrie : Un jour il m’a écrit : je suis un moudjahidine. Il s’est marié avec une syrienne. Il a changé de nom. Il m’a présenté sur Skype à sa femme. Il était dans un appartement pris aux soldats de Bachar. Je sais qu’il est avec d’autres français. La Turquie les laisse passer alors qu’ils savent très bien qu’ils vont faire le jihad en Syrie.Il m’a demandé de l’argent. Je lui ai envoyé des mandats en Turquie mais aujourd’hui je refuse de lui en envoyer.
Aujourd’hui je me suis repliée sur moi même. Je suis en arrêt maladie. On se sent jugé et condamné.
Je ne crois pas à la surveillance de la police. Mon fils a fréquenté pendant des années des sites de propagande islamiste sans jamais se faire repérer. J’ai signalé sa conversion en prison là aussi sans effets.
Il faut tout faire pour empêcher le sorties du territoire des mineurs et pas seulement dans les aéroports. Mon fils c’est un adulte. Il avait 32 ans quand il est parti en Syrie. Il savait très bien ce qu’il faisait.