Dominique Bons, mère de Nicolas
MON FILS NICOLAS S'EST CONVERTI A L ISLAM EN 2010
J’ai été stupéfaite lorsqu’il me l’a annoncé.
Il a été éduqué dans le respect d’autrui sans aucune forme d’idéologie religieuse. C’est un être sensible, gentil, courtois, honnête, mais vulnérable, influençable. Il déteste l’injustice. Lorsqu’il était enfant, il était toujours rieur. C’était la joie de vivre!
Au début de sa conversion, propos conflictuels entre nous; situation, pour moi, difficile à gérer, que j’étais loin d’imaginer, car je suis athée mais avec des valeurs. Ensuite, j’essaie de le comprendre, de me mettre à sa portée sans le blâmer, mon message à moi parle d’ouverture d’esprit; tout être humain a droit à la liberté d’opinion, d’expression et de justice.
Je lui pose la question suivante:
– Penses tu que ta mère est juste, tolérante, compréhensive?
– Oui.
– Pourtant, je n’ai pas de religion.
Il a peur pour moi, il est persuadé que mon âme sera perdue si je ne suis pas croyante. Aussi, par moments, il acquiesce mes propos, mais il tente tout de même de me persuader de ses convictions religieuses. Au bout de quelques temps, il insiste beaucoup moins. Il comprend que çà ne sert à rien. Malgré nos différents religieux, il est respectueux envers moi. Il s’exclut chaque jour davantage de la société en tenant des propos idéologiques anti-occidentaux. Pour mon fils, nous vivons dans une société de profit et nous sommes manipulés.
LA TRANSFORMATION S’OPERE FIN 2011
Il ne participe plus aux manifestations familiales (anniversaires, noëls…) ni aux sorties entre amis. Il serre la main aux amies femmes, avant il les embrassait. Il se sent incompris. Tout est mal, les divertissements (sauf le sport et surtout le foot), les relations sexuelles avant le mariage, le tabac (un bien pour un mal), Son seul objectif est de s’imprégner du Coran. Pour moi, dans nos discussions, j’insiste encore sur le fait que les sentiments amoureux sont incontrôlables. Il me répond qu’il respecte la femme dans sa pureté. Il tient des propos d’une extrême rigueur en disant notamment que Nous, les occidentaux, sommes des mécréants et que notre âme n’ira pas au paradis.
DEBUT 2012
Il se radicalise de plus en plus, fréquente assidument les mosquées. Il dit avoir trouvé une famille dans la communauté musulmane qui « le comprend et qui l’entoure ». Il travaille sur des chantiers avec des artisans musulmans, des gens très bien, et peut ainsi faire ses cinq prières journalières. Pour ma part, j’insiste sur le fait que je respecte ses convictions ; mais, que des fous se servent d’Allah pour endoctriner des jeunes : Non ! La haine, la colère et la violence sont contraires au « Coran ». Si mon fils s’en était tenu qu’à ces pensées pieuses et ses valeurs religieuses…nous n’en serions pas là.
COURANT 2012
Jamais il n’a prononcé le mot « djihad ». Par contre, il s’intéresse à la situation en Syrie
– Le régime de Bachar El Assad est tyrannique et génocidaire, Je lui réponds, que moi aussi, je suis révoltée par ce qui se passe en Syrie.
– Il me dit : Un jour, je partirai dans un pays musulman, ce n’est pas ma place ici, c’est en contradiction avec mes pensées; je veux me rendre utile, faire de l’humanitaire.
Et, il a choisi un des seuls pays où il ne faut pas aller: LA SYRIE.
Trop tard, je ne l’ai pas vu arriver et je m’en veux.
FIN MARS 2013
Avant son départ (avec son demi frère, lui aussi converti et décédé en terre syrienne en août 2013), qu’il m’avait caché jusqu’au bout, sachant que je l’en aurais dissuadé, ses propos envers les musulmans de France ont changé : Pour lui, ici en France ce ne sont pas de vrais musulmans.
DEBUT NOVEMBRE 2013
Déjà huit mois que Nicolas est en Syrie. A certains moments, je perds espoir de le revoir, mais je m’accroche et j’y crois. Je suis régulièrement en liaison téléphonique avec lui. Je suis rassurée: il est encore en vie. Je parle de tout et de rien, je lui donne des nouvelles de la famille, il me demande souvent comment va sa sœur. Il me dit qu’il est heureux, qu’il ne va pas au combat, que l’amitié avec ses frères musulmans est plus vraie et intense que celle qu’il avait avec ses amis d’enfance ! Surtout, garder le contact, pour lui et pour moi. Mon fils a aussi besoin de m’entendre, je ne l’abandonnerai pas, et je sais, malgré tout, qu’il m’aime du plus profond de son cœur, à sa façon. Mais, il est déjà pris dans les mailles du filet, l’engrenage djihadiste.
DECEMBRE 2013
Nous sommes en relation téléphonique à peu près une fois par semaine. Le 19 décembre, nous nous parlons; je le sens serein. Je lui dis que je le rappelle le 23 décembre; car il doit essayer de contacter un jeune toulousain parti en Syrie quelque temps avant lui. Je voudrais rassurer la maman de ce jeune homme qui est sans nouvelles de son fils depuis plusieurs mois. En plus, je veux lui faire la surprise pour son anniversaire qui tombe le 23 décembre. Ce jour là, impossible de le joindre. J’essaie les jours suivants; je suis angoissée, ce n’est pas normal. Chaque fois que nous fixons un rendez-vous téléphonique, nous arrivons à nous contacter. Je n’ai plus aucune nouvelle.
Le 02 janvier 2014, je reçois un sms m’annonçant la mort de mon fils.
Mon fils et son demi-frère sont décédés à 5 mois d’intervalle. Je suis révoltée par la manipulation et l’endoctrinement qu’ils ont subi. Ils ne méritaient pas de mourir. J’ai décidé de créer l’association « syrien ne bouge…agissons ». Si je ne peux plus venir en aide à mon fils et à son demi frère, je vais tout mettre en œuvre afin de sauver d’autres jeunes âmes manipulées.